L’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme

Qu'est-ce que le Fonds de garantie ?

En France, un organisme est dédié à l’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme. Créé en 1986, le Fonds de Garantie des Victimes des actes de Terrorisme est alimenté par des prélèvements sur chaque contrat d’assurance. Tous les assurés de France contribuent donc à ce Fonds, pourvu d’une mission de service public, qui consiste à gérer cette indemnisation des victimes au titre de la solidarité nationale.

L’objectif est double. D’une part, il s’agit d’offrir à ces victimes une interface d’indemnisation relativement simple, bien qu’il est illusoire d’espérer une indemnisation intégrale et juste sans l’assistance de professionnels de l’indemnisation. D’autre part, cela permet d’éviter l’écueil (très fréquent en matière de terrorisme) de l’insolvabilité des auteurs.

Le principe de cette solidarité (que l'on retrouve pour certaines victimes d'infraction de droit commun) est d’autant plus justifié que la plupart des victimes ne sont généralement pas visées personnellement par les terroristes, mais – à tort ou à raison – en qualité de « représentantes » d’un symbole, d’une communauté, d’une religion, d’une nation ou d’une société.

Qui peut être indemnisé par le Fonds de garantie ?

Les victimes françaises d’actes qualifiés de terroristes par les autorités (en France, il s’agit en pratique du Procureur de la République de Paris), que ces actes soient commis en France ou à l’étranger, ainsi que les victimes qui n’ont pas la nationalité française, mais uniquement lorsque l’acte a été perpétré sur le territoire national.

Parmi les victimes, il faut distinguer les victimes directes, lorsqu’elles ont survécu et leurs proches, soit en qualité d’ayant droit en cas de décès de la victime directe, soit en qualité de victimes indirectes.

Le terme victime doit être entendu dans un sens relativement large puisque l’existence de blessures physiques n’est pas forcément une condition d’indemnisation : le traumatisme psychologique doit également être indemnisé, quand bien même il ne s’accompagnerait pas d’atteintes physiologiques.

Le Ministère Public (le Procureur de la République) adresse au Fonds de garantie, après chaque acte qu’il détermine comme étant terroriste, une liste des victimes, ce qui permet d’identifier rapidement ceux qui sont en droit de bénéficier de cette indemnisation. Cependant, ceux qui ne sont pas mentionnés sur cette liste ne sont pas nécessairement exclus du processus : ils devront toutefois apporter la preuve de leur statut de victime d’un acte terroriste.

En quoi consiste cette indemnisation ?

Comment réparer la perte d’un être cher ? Comment compenser une blessure, un handicap, un traumatisme ?

Malheureusement, pour l’ensemble de ces préjudices, il n’y a pas d’autre solution qu’une réparation financière. Cet argent ne saura pas effacer les souffrances, l’absence d’un proche, ou la perte de fonction d’un membre. Cependant, l’indemnisation pourra contribuer, parfois, à redonner une certaine dignité et à l'adaptation au handicap de certaines victimes.

Mais une partie des préjudices sont purement économiques : pertes de gains professionnels, qu’ils soient temporaires ou définitifs, frais de santé non pris en charge par la Sécurité sociale ou une mutuelle (sauf bénéfice du statut de victime civile de guerre), coût de l’assistance par une tierce personne, ou encore frais d’obsèques. Dans ce cas, l’indemnisation compense naturellement la perte financière ou le manque à gagner.

Le processus « amiable » :

Chaque victime peut saisir le Fonds de garantie d’une demande d’indemnisation par courrier, sans qu’un formalisme particulier ne soit exigé. Il est évidemment préconisé de formuler cette réclamation par lettre recommandée avec avis de réception.

Une provision (c’est-à-dire une indemnisation provisoire, dont le montant sera ultérieurement déduit de l’indemnité définitive) peut être demandée dès le dépôt de la demande. Ensuite, le Fonds se chargera de l’instruction de la demande en sollicitant les pièces justificatives requises et les informations nécessaires. Un médecin expert pourra être désigné, afin de procéder à l’évaluation des dommages corporels.

Enfin, une offre d’indemnisation sera formulée par le Fonds à l’issue de l’instruction du dossier. L’offre est calculée en fonction de barèmes d’indemnisation et par rapport aux conclusions de l’expertise médicale, le cas échéant.

A ce stade, les victimes non assistées d’un Avocat n’ont quasiment aucun moyen de s’assurer que cette somme d’argent est la juste indemnisation de leurs préjudices, si ce n’est une confiance aveugle dans l’évaluation opérée par cet organisme. Comment être sûr que l’offre correspond à ce qu’un Tribunal pourrait allouer ? Comment être sûr que tous les préjudices ont été relevés ? Chaque victime subit un préjudice différent et comparer simplement l’indemnisation proposée pour une victime à celle obtenue par une autre ne peut apporter de réponse à ces questions.

Face au Fonds de garantie (et c’est le même problème contre n’importe quelle compagnie d’assurance), une seule question résume toutes les autres : est-ce qu’il est prudent de laisser le débiteur évaluer seul le montant de ce qu’il doit payer ?

C’est pourquoi il est indispensable d’être assisté de professionnels de l’indemnisation : un médecin conseil et un Avocat. Mais l’idéal est de les faire intervenir dès l’instruction du dossier. Notamment, une expertise médicale se prépare bien avant la réunion elle-même. Ensuite, les justificatifs doivent être rassemblés puis communiqués pour justifier de l’existence de certains préjudices. L’assistance de ces professionnels permettra justement de favoriser un règlement amiable satisfaisant.

Mais, en cas d’offre manifestement insuffisante, de refus d’indemnisation de certains postes de préjudices ou d’un rapport d’expertise médicale ne correspondant pas à la réalité des préjudices, la mission de l’Avocat est alors de conseiller à la victime de saisir le Tribunal compétent.

La procédure judiciaire :

En effet, il est possible en cas d’échec de cette phase amiable, de saisir le Tribunal d’instance ou le Tribunal de grande instance (selon le montant de l’indemnisation sollicitée), afin de demander au Juge de trancher la question de l’indemnisation, voire de solliciter la désignation d’un Expert.

Les règles de prescription sont conformes à celles du droit commun de la réparation du dommage corporel, c’est-à-dire, un délai de 10 ans, dont le point de départ peut être reporté à la date de la consolidation des blessures, le cas échéant. Il n’y a pas de délai particulier pour agir en justice après l’offre formulée par le Fonds de garantie.